Liaisons Dangereuses dessinée par Elie TOP

« Après dix années rythmées par des collections traversant les couloirs du temps et de l’espace (de l’infini de l’univers aux légendes arthuriennes en passant par un bestiaire immémorial) je fais halte au siècle des Lumières.

Vous avez dit Lumières ? Et je réponds Diamants !

Car c’est bien du diamant qu’il s’agit - cœur scintillant de mon embarquement pour Cythère… de ce diamant ancien, à la taille manuelle imparfaite si particulière qui lui donne un éclat si séduisant et émouvant. » - Elie Top

Liaisons Dangereuses racontée par

Judith Benhamou-Huet

Jardin de Versailles

Je marchais dans le jardin géométrique

Et tout en me perdant dans ses courbes

Et ses recoins j’ai pensé que j’étais perdu.

C’était délicieux.

Ici on domestique les arbres pour en faire des dessins.

Ils les appellent « jardins à la française ».

J’ai cru naïvement que je pourrais m’échapper de ce labyrinthe

au sein duquel les jeux les plus mutins se cachent.

Les Liaisons Dangereuses 1960

Mais le dessin du jardin suscitait le trouble comme ton cœur scintillant.

Tu sais celui que tu arbores suspendu à un ruban noir

Illusion de la perception.

Il convient de l’observer de très près.

Croyez-moi.

Car le dessin de ton cœur est multicouche.

Au fond il se présente flambant d’or.

La petite coupelle précieuse réfléchit la lumière.

En surface apparaît une pudique voilette d’argent sur laquelle se sont posés des diamants.

Grille Royale, Château de Versailles

J’ai marché dans le jardin géométrique

et finalement j’en suis sorti.

La nuit tombait.

Je suis arrivé dans la salle de bal.

J’étais grisé.

Avec qui ai-je dansé ?

Peu importe. Je t’attendais.

Galerie des Glaces, Château de Versailles

Je ne voyais que les lustres aux sémillantes pampilles

qui virevoltaient autour de ma tête.

Elles m’ont encore rappelé ton cœur

avec ses diamants déposés là délicatement.

Ils les appellent « taille ancienne».

Ces pierres du passé recèlent des histoires.

Elles se jouent des reflets ondoyants

comme les lustres autour de ma tête qui dansent encore.

Marquise Isabelle de Merteuil

Le plaisir est coupable.

La lassitude jamais loin.

Tu te souviens lorsque Jeanne disait :

«On s’ennuie de tout mon ange, c’est une loi de la nature?»

Quelle nature ?

Peut-être pas cette fois. Qui sait ?

Je t’attends.

J’ai frémi.

Tu as surgi des ombres,

celles créées par les lumières voilées des chandelles suspendues.

La reine Marie-Louise de Bourbon Parme, portrait par Anton Raphael Mengs 1765

Autour du cou ton ruban noir.

Sur le ruban noir ton cœur scintillant.

Un cœur à la française.

Géométrique.

En écho, sur tes doigts fins,

ta bague triple dessinée comme un poing américain

reprenait le même motif : croisillons d’argent, fond d’or,

illusion d’optique et diamants scintillants à l’infini.

Brisant le temps, dans la salle de bal anachronique

Edwige Belmore

Blondie s’est mise à chanter.

C’était son « Heart of glass ».

Elle répétait. "I was losing my mind".

"Losing my mind”.

Tout en me perdant dans tes courbes et tes recoins

j’ai pensé que j’étais perdu.

C’était délicieux.

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